L’éducation, la sensibilisation aux attitudes et à la communication (verbale et non verbale), ainsi que l’expression sincère d’empathie et de compassion sont autant d’éléments clés pour aborder le sujet du suicide avec les clients. Renseignez-vous sur les soins tenant compte des traumatismes. Ne vous contentez pas d’étudier les principes—imprégnez-vous des mots et de leur signification, et réfléchissez-y afin qu’ils deviennent une part intégrante de vos interactions naturelles avec chaque client. Vos échanges pourraient leur sauver la vie.

—Anita David

 

Pleins feux sur la communauté

Cette édition spéciale de notre série Pleins feux sur la communauté met en vedette certaines personnes qui ont contribué à l’élaboration du programme Parler de suicide : Renforcer les capacités des fournisseurs de soins et insuffler de l’espoir aux clients. Cette série d’articles « Pleins feux », mettent en avant des collaborateurs, des militants et des professionnels qui ont contribué à la création de cette ressource essentielle destinée aux fournisseurs de soins de santé en partageant leurs connaissances, leur expérience et leur expertise.

Pour lire d’autres articles de cette série, faites défiler la page vers le bas.

Anita David

Coprésidente du Groupe couloir
Commission de la santé mentale du Canada (CSMC)

Conseillère stratégique en matière de savoir expérientiel
BC Mental Health and Substance Use Services (BCMHSUS)

 

Médias sociaux :

LinkedIn: https://www.linkedin.com/in/davidanita/
Facebook: https://www.facebook.com/anita.david.90410

Sites Web affiliés :

Commission de la santé mentale du Canada: https://commissionsantementale.ca/

Emplacement : Vancouver, Colombie-Britannique

 


Pleins feux sur Anita

CHA Learning et la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) sont fiers de mettre en lumière l’un des nombreux professionnels de la santé qui œuvrent à travers le Canada pour faire de la santé mentale et de la prévention du suicide une priorité dans les établissements de soins.

Cet article souligne l’importance de notre micro-cours en ligne « Parler de suicide », créé en partenariat avec des médecins de famille, du personnel infirmier, des experts en prévention du suicide et des personnes ayant un savoir expérientiel passé et présent, afin d’aider les professionnels de la santé à acquérir les connaissances, les compétences et la confiance nécessaires pour aborder le sujet du suicide avec leurs patients.

Dans la rubrique « Pleins feux » ci-dessous, vous découvrirez le parcours personnel et professionnel d’Anita, ce qui l’a amené à s’intéresser à la santé mentale et à la prévention du suicide, les initiatives auxquelles elle a participé et les leçons enrichissantes qu’elle a tirées de son expérience. Son histoire est une source d’inspiration et d’espoir, et nous rappelle à quel point chaque conversation est importante.

Anita a joué un rôle essentiel au sein du comité consultatif « Parler de suicide », où elle a fait part de ses connaissances et de son expertise en tant que patiente partenaire et personne ayant un savoir expérientiel passé et présent.

 

Pour reprendre les mots d’Anita :

J’ai vécu avec la maladie mentale et les idées suicidaires toute ma vie, avant même de trouver les mots pour les nommer. Je portais un masque fait de rires et d’insouciance, terrifiée à l’idée qui si je révélais la vérité, les gens me fuiraient. Mais les masques finissent toujours par craquer. Le mien s’est complètement fissuré.

Pendant des années, j’ai nié ce qui se passait, même lors de mes consultations psychiatriques. Je n’ai jamais parlé des pensées suicidaires qui m’assaillaient. Faire semblant était plus rassurant. Avec le temps, j’ai nommé mon tourment : le monstre. Il m’a traqué, m’a soufflé des mensonges à l’oreille, a ébranlé ma confiance et m’a fait perdre toute estime de moi. Je me suis battue sans relâche, mais le monstre a fini par prendre le dessus.

Au plus bas, lorsque l’idée de passer à l’acte est devenue une réalité, mon médecin est intervenu juste à temps. Une ambulance est venue me chercher et j’ai passé six semaines en soins psychiatriques. Mais le cauchemar n’était pas fini, c’était juste une accalmie avant la prochaine tempête. J’en suis ressortie fragilisée, menacée de perdre mon logement, mon revenu, ma santé et tout espoir. Le monstre n’avait pas dit son dernier mot. Il est revenu plus fort, nourrissant toutes les incertitudes et tous les revers. Chaque jour, trouver des raisons de continuer était difficile.

Le fait d’avoir perdu des proches et des personnes de mon entourage par suicide a été dévastateur. Et puis, après avoir repris mon souffle suite à la douleur causée par ces pertes, je me suis demandé pourquoi je continuais d’exister. Cependant, j’ai persévéré, notamment grâce à une thérapie, à un traitement médicamenteux, à la pleine conscience, au yoga, à l’amour de soi et à bien d’autres facteurs, dans le but d’affronter cette période sombre. Aujourd’hui, le monstre est toujours là, mais je renonce à le combattre. Je préfère transformer mes troubles en superpuissances par le biais de la force de l’espoir, et cheminer avec grâce et gratitude tout au long de ma vie.

Au cœur de ma démarche se trouve ma volonté de créer des espaces plus sécuritaires et inclusifs, où les personnes ayant un savoir expérientiel passé et présent sont respectées et habilitées. J’ai commencé par offrir du mentorat à d’autres personnes ayant un savoir expérientiel, en partageant des outils de recherche et de méthodes de narration. En 2019, j’ai créé et interprété un monologue théâtral pour raconter mon parcours, ma lutte contre le monstre de la maladie mentale, ainsi que la conversion de ma douleur en motivation. En 2020, j’ai rejoint le Groupe couloir de la CSMC, dont je suis devenue coprésidente. En 2022, j’ai été nommée conseillère stratégique en matière d’expériences vécues, afin de les intégrer de manière centrale aux comités, conseils et travaux de recherche. En 2024, j’ai été nommée représentante canadienne du Global Leadership Exchange afin de faire valoir l’importance du savoir expérientiel passé et présent à l’échelle mondiale. Cette année, j’ai reçu la Médaille du couronnement du roi Charles III, une distinction inattendue qui récompense mon engagement en faveur de l’éducation et de la recherche en santé mentale, ainsi que pour avoir jeté des ponts entre les patients, les familles et les organismes de santé.

 

Parlez-nous de votre expérience professionnelle et de votre travail dans le domaine de la santé mentale…

Question : Qu’est-ce qui vous a incité à vous intéresser à la santé mentale et à la prévention du suicide? Y a-t-il eu un moment ou une expérience spécifique qui a déterminé votre démarche?

Je me consacre à la santé mentale et à la prévention du suicide, car il est essentiel de normaliser ces sujets. J’ai moi-même été plongée dans l’obscurité pendant de longues années, cachant ma douleur. Mais lorsque j’ai commencé à exprimer ce que je ressentais et que j’ai été accueillie avec empathie et compassion, j’ai pris conscience de ma valeur et j’ai découvert une voie qui m’a donné envie de vivre pleinement, jour après jour. Je m’efforce constamment d’atteindre cet objectif. Après avoir traversé des épreuves personnelles et perdu des êtres chers, ce but est devenu encore plus important à mes yeux.

 

Question : Pourquoi avez-vous choisi de vous joindre au comité consultatif de Parler de suicide?

Il est primordial que les cliniciens soient conscients que leur comportement, leur attitude et leurs paroles ont une incidence réelle. Une seule parole ou un seul geste de mépris peut suffire à isoler une personne et à renforcer son sentiment de vide. Je me réfère toujours aux principes fondés sur la prise en compte des traumatismes. Il est essentiel que chaque patient ou client se sente écouté, reconnu, respecté et valorisé, car il perçoit alors qu’on est là pour lui. Il s’agit parfois de la première fois qu’il a le sentiment que quelqu’un est là pour lui. Le praticien devient alors la personne dont il se souvient et dont il évoque son histoire lorsqu’il atteint une certaine stabilité dans son rétablissement.

 

Question : Quels ont été les plus grands défis auxquels vous avez été confronté dans ce travail, et comment les avez-vous surmontés?

Il peut parfois être difficile d’être une personne ayant un savoir expérientiel passé et présent dans ce domaine, et ce, à cause des autres personnes. Je ne parle pas ici de celles qui ont elles-mêmes un savoir expérientiel, passé et présent, ou de celles qui comprennent toute l’importance de prendre soin de leur santé mentale, comme les fournisseurs de soins. Ces personnes savent qu’il faut faire preuve de beaucoup de force pour se rétablir. Elles souhaitent transmettre leurs connaissances pour s’épanouir, tant sur le plan individuel que sur le plan des systèmes et de la société.

Ces personnes n’ont jamais reconnu qu’elles vivaient elles-mêmes avec une maladie mentale ou qu’elles étaient victimes de stigmatisation (comme cela a été mon cas pendant la majeure partie de ma vie). Ou bien elles ne connaissent personne dans leur famille ou leur communauté qui parle ouvertement de ses problèmes de santé mentale. Elles portent souvent des jugements, ce qui fait que les autres n’osent pas se confier à elles.

 

Question : Selon vous, comment la santé mentale se manifeste-t-elle le plus souvent dans les établissements de soins de santé, et quelles sont les premières mesures à prendre pour y faire face?

Dans les établissements de soins, les cliniciens et le personnel sont souvent plus absorbés par la maladie que par le fait de considérer chaque patient comme un individu doté de facultés innées, de forces et de la capacité de se rétablir. À maintes reprises, j’ai eu l’occasion de me présenter en tant que personne ayant un savoir expérientiel, passé et présent. Les réactions suscitées avant même que je n’aie prononcé un mot sont très révélatrices de la manière dont je suis considérée.

Nous devons cesser de considérer le suicide comme un signe de faiblesse, une recherche d’attention ou une vengeance à l’égard d’autrui, et nous concentrer sur la personne. Celle-ci a besoin de temps et d’espace pour partager son expérience sans craindre d’être jugée. Il ne suffit pas de connaître la terminologie des soins tenant compte des traumatismes; nous devons l’incarner dans notre manière d’aider une personne à se sentir comprise, entendue, valorisée et respectée. Cela signifie qu’il faut accorder du temps et de l’attention, éviter les reproches et établir un lien avec la personne afin de déterminer ce qui lui sera le plus utile.

Il est essentiel de reconnaître que chaque individu est unique et qu’une méthodologie uniforme pour aborder une tâche aussi complexe est vouée à l’échec. Je reconnais également que les cliniciens disposent de peu de temps, mais le soutien d’un pair est inestimable pour favoriser une compréhension commune d’une expérience comme le suicide. Un pair peut apporter de l’aide à un client ou un patient, car même s’il ne partage pas exactement le même vécu, il a parcouru un chemin comparable, ce qui lui permet de comprendre les difficultés rencontrées par l’autre.

 

Question : Comment pensez-vous que les professionnels de santé peuvent contribuer à la prévention du suicide dans le cadre de leur travail quotidien?

Il ne suffit pas d’apprendre la notion de soins tenant compte des traumatismes, il faut aussi y réfléchir en se basant sur des expériences passées et imaginer comment ces soins auraient pu être utiles ou aboutir à un meilleur résultat pour un client ou un patient. Il faut faire preuve de courage pour évoquer son expérience et imaginer comment la situation aurait pu se dérouler dans les meilleures conditions. Observez le langage corporel et le positionnement dans la pièce. Est-ce que vous regardez les patients dans les yeux ou est-ce que vous prenez des notes dans le système? Pouvez-vous vous arrêter et leur accorder toute votre attention? Parvenez-vous à poser des questions respectueuses et à instaurer un climat de confiance? Arrivez-vous à distinguer la personne de la maladie? Cela suppose de se former, de s’engager, d’agir et surtout de placer l’humain au centre de chaque interaction, car vous pourriez être la personne qui transformera la vie de votre patient à un moment décisif.

Continuez à vous former. Cherchez à apprendre, tant sur le plan professionnel qu’en permettant à vos patients d’être vos professeurs. Le cours Parler de suicide est un bon point de départ. Ce cours gratuit permet aux professionnels de santé d’acquérir les connaissances, les compétences et la confiance nécessaires pour instaurer un climat de confiance avec les patients présentant un risque de suicide, engager des conversations constructives sur le sujet, évaluer les facteurs de risque, mettre en œuvre les pratiques exemplaires en matière de planification de la sécurité et fournir un soutien approprié.

 

Question : Dans une perspective d’avenir, quels changements ou innovations souhaiteriez-vous voir dans le domaine des soins de santé mentale?

Nous devons socialiser les soins de santé mentale comme nous le faisons pour les soins de santé physique. La première fois que j’ai passé du temps dans l’unité, j’étais très anxieuse car je devais retourner au travail quelques jours plus tard. Mon amie, qui me rendait visite, m’a rappelé à l’ordre en me disant que j’étais hospitalisée et que ce que je vivais n’avait rien de différent de ce que j’aurais vécu si j’avais été percutée par un autobus! Cela m’a fait prendre conscience de la situation. Une crise de santé mentale est une situation comparable et doit être traitée avec la même attention et les mêmes égards.

Les praticiens devraient tous être tenus de suivre une formation sur les compétences comportementales, telles que l’écoute active et empathique, la communication claire et un langage exempt de stigmatisation et de racisme. Toutes ces questions peuvent être présentées dans un PowerPoint, mais pour qu’elles aient un véritable retentissement, les professionnels doivent se pencher sur des études de cas, entendre des récits d’expériences réelles et ressentir les émotions. Ils doivent faire le lien avec leur vie personnelle.

 

Question : Quel conseil donneriez-vous à d’autres personnes passionnées par la santé mentale dans le domaine des soins?

Le changement prend du temps. Le changement est un processus à long terme. Vous devez gagner la confiance des gens, leur montrer des preuves (statistiques et témoignages) pour convaincre ceux qui raisonnent de manière logique de même que ceux qui sont plus proches de leurs émotions. Réfléchissez aux grands enjeux que vous essayez de résoudre et intégrez les idées et les préférences des personnes qui ont un savoir expérientiel passé et présent. Apprenez à les connaître individuellement ou en groupe, par le biais d’activités artistiques, de sorties dans la nature ou d’échanges sociaux, lors de réunions, de conseils, de déjeuners-conférences, etc. Trouvez des points communs qui dépassent le cadre professionnel.

 

Perspectives personnelles et conseils…

Question : Qu’est-ce qui vous motive dans ce travail, en particulier lorsque les difficultés semblent insurmontables?

Il peut parfois être difficile de rester motivé lorsqu’on travaille dans le domaine de la santé, que ce soit au sein des autorités sanitaires, dans les universités ou dans des associations locales. Je m’efforce toutefois de toujours garder à l’esprit les personnes que j’aide. Est-ce que cela leur est bénéfique, et comment? J’éprouve un grand plaisir à exercer mon métier et j’essaie de m’accorder suffisamment de temps personnel pour me ressourcer.

 

Question : Si vous pouviez donner un conseil aux professionnels de la santé mentale qui souhaitent améliorer leurs résultats, quel serait-il?

Remettez en question vos croyances et faites preuve de curiosité pour explorer les différents aspects et croisements de votre travail. Grâce à un apprentissage continu, vous serez en mesure de vous adapter aux changements.

Montrez-vous ouvert et bienveillant, car vous ne saurez jamais quel effet vous avez sur chacun de vos patients. Toutefois, il y aura toujours quelqu’un qui n’oubliera jamais l’attention que vous lui aurez portée.

Dans tout ce que vous faites, n’oubliez jamais l’humanité de vos patients. Ce qui compte, ce n’est pas leur numéro d’identité ou leur numéro de dossier médical, mais qui ils sont, ce qu’ils ont vécu, ce qu’ils traversent et ce qu’ils ressentent.

 

Question : Quelle est votre façon préférée de vous détendre après une longue journée de travail?

Dans mes rares temps libres, j’aime prendre soin de moi avec des soins du visage, des séances de sauna et des massages, laisser libre cours à mon imagination en écrivant et en me mettant en scène, trouver la paix par le biais de la méditation et du yoga, et tenter de gagner l’amour de mon chat super décontracté et potelé, qui s’appelle « Caaaaaat »!

 

Question : Si vous n’étiez pas dans le secteur de la santé, quelle carrière auriez-vous choisie?

J’ai toujours été du genre à faire des performances créatives. Je ne sais ni dessiner ni peindre, mais donnez-moi un public et placez-moi sur scène! Je serais actrice. Ou peut-être écrivaine. Je suis des cours de temps en temps, mais je me suis toujours imaginée parcourir le monde avec mon petit ordinateur portable, écrivant mes histoires et racontant celles des autres en incarnant un personnage.

 

 

Apprenez-en plus sur les initiatives de prévention du suicide de la Commission de la santé mentale du Canada.

 

Parler de suicide : Renforcer les capacités des fournisseurs de soins et insuffler de l’espoir aux clients

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Le micro-cours en ligne Parler de suicide est gratuit et autodidacte. Il s’adresse à tous les professionnels de la santé. En seulement trois heures, vous acquerrez les connaissances et la confiance nécessaires pour aborder le sujet du suicide, soutenir les personnes en situation de crise et favoriser l’espoir au sein de votre établissement de santé.

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Ce programme a reçu un soutien financier de Santé Canada.

 


La série « Pleins feux » sur Parler de suicide

Le cours Parler de suicide a été élaboré par des personnes dévouées, impliquées dans l’amélioration du soutien en matière de santé mentale et de prévention du suicide dans le secteur des soins de santé. Cette série spéciale « Pleins feux » met en lumière quelques-unes des personnes qui ont contribué à façonner le cours et à garantir son efficacité.

Cliquez sur les profils ci-dessous pour découvrir leurs témoignages et en savoir plus sur ces artisans d’un travail précieux.